Tribune de Fleur Thesmar, présidente de l’AFIEG, publiée sur le site du Congrès Gazelec (Accéder à la version originale).

Si les objectifs ambitieux de la France en termes de développement des énergies renouvelables (ENR) constituent une opportunité unique de se positionner sur de nouvelles filières dans le cadre d’une transition énergétique, celles-ci doivent avoir l’ambition de s’inscrire rapidement dans une logique de marché.

Pour le consommateur, à court terme, le développement des ENR s’accompagne d’une hausse tarifaire à travers le mécanisme de la CSPE . Celle-ci supporte un dispositif de soutien aux ENR via les d’obligations d’achats par l’opérateur historique. Ce dispositif vise à compenser le différentiel entre le prix d’achat de l’énergie par filière et le prix de marché. A ce mécanisme de subvention s’ajoutent les investissements nécessaires pour les réseaux afin d’accompagner le développement des énergies renouvelables.

Si certains s’inquiètent des évolutions importantes de ce mécanisme, il y a lieu de s’interroger sur la nécessité de le réserver à des énergies non matures afin d’accroitre son efficacité, d’alléger les charges pesant sur les consommateurs et d’éviter les distorsions sur les signaux de prix de marché, notamment à la pointe.

En effet, les évolutions récentes et les prévisions concernant la CSPE obligent désormais le législateur à reconsidérer les subventions accordées à des filières matures dont les outils industriels sont amortis afin de les réserver à des filières porteuses d’avenir dont les progrès technologiques permettent de fixer un objectif raisonnable d’atteinte de la parité réseau. A ce titre, une fois de plus, l’exemple allemand nous montre qu’un objectif affiché d’une parité réseau avec la fin programmée des subventions constitue un moteur vertueux pour les filières éoliennes et photovoltaïques notamment.

Par ailleurs, malgré leur petite part dans la production nationale, l’essor des ENR a un impact paradoxal sur le marché de gros. D’un côté les ENR s’ajoutent aux moyens de production en base, qui sont excédentaires jusqu’en 2020, ce qui occasionne une baisse des prix de marché. De l’autre, la production d’énergie traditionnelle en pointe est concurrencée par les ENR qui représentent jusqu’à 20% de cette production. A cet égard, le problème du financement de la pointe n’est pas encore résolu.

Si le mode de financement des ENR est à court terme à l’origine d’une partie de la hausse des prix de détail et sans doute de tensions sur la pointe, l’enjeu, à moyen terme, pour les ENR sera donc de devenir économiquement viables, et d’accepter une baisse progressive et équilibrée des investissements publics. C’est seulement ainsi qu’elles créeront des emplois, s’exporteront hors du territoire national et contribueront à la compétitivité de la nation.

Les mécanismes d’obligation d’achat destinés aux ENR, pour être efficaces doivent donc par nature être transitoires. La parité réseau doit être l’objectif poursuivi : les obligations d’achat pourraient par exemple être davantage basées sur les prix de marché, plus une « prime » qui s’annule quand la parité réseau est atteinte. In fine le marché devrait devenir le mode de financement principal des ENR, qui sortiraient progressivement de la CSPE.

Enfin, d’autres solutions s’offrent à nous pour développer dès aujourd’hui des ENR économiquement viables et efficaces : développer les STEP et l’hydroélectricité (en lançant les appels d’offres pour le renouvellement des concessions hydrauliques notamment) ; introduire plus de concurrence pour inciter à la sobriété énergétique, à la maîtrise des coûts et permettre la formation du juste prix des capacités énergétiques. Seule la concurrence permet de stimuler durablement l’innovation et la recherche dans ces technologies alternatives.

Veiller sur les conditions de développement des ENR est indispensable pour qu’elles soient acceptées par les Français, et constituent un pilier de développement de la France dans la transition énergétique qui s’annonce. Néanmoins, pour que ces énergies s’inscrivent dans une transition énergétique efficace et vertueuse, elles doivent toutes se fixer de s’inscrire le plus rapidement possible dans une logique de marché.